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COLLECTION ATAKA
AU MUSEE D'OSAKA,
Par Dauphine Scalbert
pour la revue Culture Coréenne
(N°39)


Si les relations entre la Corée et le Japon ont de tout temps été complexes et délicates à analyser, car déchaînant les passions, l'art céramique est un précieux témoin de l'histoire, à la fois muet et merveilleusement parlant. Les potiers ont traversé le détroit de Tsushima dès l'époque des Trois Royaumes et de Kaya, quand est née la poterie Sue japonaise, et lors de la justement nommée guerre des potiers menée au 16ème siècle par Hideyoshi, grand amateur de thé.

La fin du dix-neuvième et le vingtième siècle auront vu voyager non pas les potiers mais les pots, car les japonais ont tout fait pour retrouver les trésors gardés par les tombes lors des travaux d'industrialisation de la péninsule, qui furent suivis de fouilles archéologiques systématiques. La Corée est le pont géographique et culturel entre le continent asiatique et le japon, et c'est ainsi que consciente ou non, avouée ou non, grande est son influence dans la sensibilité japonaise et le peuple japonais a toujours aimé s'abreuver de la transparence des céladons, de la tranquillité des porcelaines blanches, comme on boit à la source de la beauté.
Le marché d'antiquités de Tokyo aura vu passer d'innombrables merveilles provenant des tombes des dignitaires de Koryo et de la dynastie Yi, ce qui a permis aux amateurs nippons d'art coréen de compléter de magnifiques collections comme celles des musées Idemitsu, Mingei, et Nezu à Tokyo, ou des musées Yamato et Neiraku à Nara, sans oublier la collection Ataka d'Osaka, pour ne mentionner que quelques collections privées.
Cette dernière est sans doute la plus grandiose. Elle a été réunie dans les années 50 et 60 par Eiichi Ataka, homme d'affaires et artiste dans l'âme, qui s'est forgé une réputation dans le monde de la musique en tant que mécène, et aussi parmi les connaisseurs de céramique pour sa collection désormais mondialement connue. Il allait sans cesse chez les antiquaires et dans les salles de ventes ; avec ténacité et humilité, il interrogeait les marchands et se faisait aider par ses assistants pour trouver et acquérir les pièces correspondant à ses cri- tères de beauté et à ses goûts éclectiques.
Strict et perfectionniste, le "goût Ataka" est attaché non pas tant à la perfection technique de l'objet qu'à sa vigueur interne, marquée par la tension de la ligne et la grâce des couleurs. La force et la rigueur de l'ensemble de la collection sont très signifiantes et ne peuvent que séduire le visiteur.
Cet ensemble comprend 965 objets ainsi répartis : 144 céramiques chinoises (de la dynastie Han jusqu'à la fin de la dynastie Ming), 5 céramiques vietnamiennes, 2 céramiques japonaises, 21 objets de métal et en laque provenant de Corée de Chine et du Japon et surtout.., 793 céramiques coréennes. Ce choix particulier et personnel d’Eiichi. Ataka reflète l'image d'un caractère déterminé et tendu vers la passion. Les céramiques coréennes forment donc 80 % de la collection comprenant 4 objets de Shilla, 304 céramiques de l'époque Koryo, et 485 pièces de la dynastie Yi. Ces dernières représentent le plus vaste et le plus complet ensemble de céramiques coréennes hors de Corée : s'y trouvent représentés des échantillons de toutes les formes et toutes les techniques de décoration utilisées durant les dynasties Koryo et Yi.
Quand la firme Ataka & Co traversa, dans les années 1975, une grave et fatale crise financière, la collection courut le péril d'être dispersée. A l'époque, le public japonais et même le Parlement s'en émurent, à tel point que la Banque Sumitomo, habilitée à liquider la société, rendit possible la donation de la collection à la ville d'Osaka. C'est ainsi que fut construit le Musée Municipal de Céramique Orientale, dans le but exclusif de recevoir la collection.
Il s'agit d'un vaste édifice en brique se dressant sur l'île de Nakanoshima, au centre d'Osaka.

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les six salles de l’exposition permanente (l'une d'elles a été conçue pour être éclairée par la lumière du jour, ce qui est précieux pour les céladons) sont très spacieuses et hautes de plafond. Les vitrines, elles, sont encastrées dans les murs et très grandes. Elles ne contiennent que peu de pièces : 130 à 140 en exposition permanente. Et nous, en bons occidentaux pressés, nous sommes toujours surpris de voir que les visiteurs japonais s'y attardent si longtemps, absorbés par la réflexion, la concentration et la contemplation.
Le Musée consacre beaucoup d'efforts à la recherche et aux expositions thématiques. Celles-ci se renouvellent environ trois fois par an, permettant au public de voir les objets céramiques de cette collection juxtaposés avec ceux prêtés par d'autres musées. "Verseuses de la Dynastie Koryo", "Vaisseaux rituels de la Dynastie Yi", "Objets de métal et céladons de Koryo", "Céladons au décor peint à l'oxyde de fer sous émail", "Céramiques Punch'ong au décor estampé", "Porcelaines bleues et blanches au décor d'herbes des champs", "Porcelaines décorées au rouge de eu ivre",, etc... Autant de thèmes très spécialisés qui nous permettent de comparer, d'établir des relations entre les différents types de formes et de décors, et qui témoignent des usages, des contextes religieux, et des époques passées...
En 1992, le Musée d'Osaka a célébré son 10ème anniversaire par la présentation de la très belle exposition "Invitation au céladon coréen", réunissant 160 pièces superbes prêtées par les musées japonais, le Musée National de Séoul, ainsi que les musées de Brooklyn, de Chicago, Philadelphie, New York, San Francisco et Boston. En même temps, un symposium international fut aussi organisé, pour célébrer le céladon coréen, autrefois loué par les Chinois comme «premier sous le ciel».
La collection Ataka témoigne, sans nul doute, du profond senti- ment d'admiration qu'ont les Japonais pour la céramique coréenne. On peut se demander quels sont les mobiles et les critères esthétiques qui en ont formé l'excellence et l'unicité ? En effet, les goûts et les choix des collectionneurs donnent généralement lieu à des spécificités propres à chaque collection et qui peuvent être la perfection et la sophistication du goût impérial chinois, ou bien l'austère retenue des objets pour la cérémonie du thé, ou encore la beauté fonctionnelle des objets populaires qu'a louée Soetsu Yanagi... Ataka ne s'est, lui, pas engagé dans l'une ou l'autre de ces directions. Ainsi, est-il possible d'admirer au Musée d'Osaka des objets si radicalement différents que les plus purs céladons (au décor irréel tant il est parfait), les austères porcelaines simplifiées à outrance, ou les vases paysans à la rustique vigueur. Mais leur unité, car il en existe une, est donnée par le dynamisme rempli de vigueur et d'émotion, caractéristique du puissant tempérament coréen, immuable malgré la multiplicité des moyens d'expression.

Dauphine Scalbert